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La manière dont nous imaginons l’avènement d’un monde qui n’exploiterait plus les animaux va largement influencer nos choix stratégiques. Cette fiction d’anticipation envisage comment un siècle de lutte animaliste pourrait mener à une abolition de l’exploitation animale en France.
Changer le monde ne s’exige pas. Ça ne s’invente pas non plus. Ça s’organise. Il faut rassembler des informations, planifier, faire preuve d’un sens aigu des réalités et des possibilités de changements.
Axelle Playoust-Braure, S’inspirer de Spira
Il est regrettable qu’aucune association française n’ait à ce jour expliqué sa démarche par sa vision de la manière dont nous arriverions à une abolition de l’exploitation animale [1]. Cela pourrait dans certains cas permettre de calmer les fantasmes carnistes sur l’insurrection armée que nous préparerions de mèche avec les GAFAM, et dans d’autres d’expliquer pourquoi des actions a priori décrédibilisantes et créant une forte opposition [2] pourraient s’avérer positives.
De la naissance de l’antispécisme français à l’émergence d’un débat public sur l’abolition
À la fin du 20e siècle, le mouvement antispéciste apparaît. Ses textes très théoriques ne parviendront cependant à se diffuser ni parmi les milieux militants, ni parmi les milieux universitaires. Ce n’est qu’avec la popularisation de l’usage d’internet que les vidéos de dénonciation des conditions d’élevage et d’abattoir parviendront à initier le débat public sur le bien-fondé de l’exploitation animale.
L’institutionnalisation de la lutte à la fin des années 2010
Tournant 2020, la lutte s’institutionnalise. Un parti animaliste, monothématique, donne de la visibilité et une nouvelle crédibilité à une demande publique d’action en faveur des animaux. La représentation des intérêts des animaux auprès des élus se coordonne autour du premier lobby animaliste. Les grandes associations s’adressent aux entreprises et aux élus pour obtenir des réformes telles que la fin de l’utilisation des fourrures dans le secteur de l’habillement, ou l’interdiction d’achat d’animaux sauvages pour les cirques. La première victoire de taille, qui servira de modèle par la suite, concerne l’interdiction de l’élevage des poules pondeuses en cage. Les grandes chaînes de supermarché et les producteurs acceptent un à un de ne plus se fournir auprès d’élevages en cage. Plus il y a de concurrents qui ont abandonné cette pratique, plus la pression est forte envers les retardataires. L’intérêt économique pour l’élevage en cage ayant diminué, les députés votent l’interdiction de l’installation de nouvelles cages, puis, après un délai ayant permis à la filière de s’adapter, l’interdiction de la production et de la vente d’œufs issus de poules en cage en 2035.
Chaque avancée est l’occasion de raviver le débat sur la place donnée aux animaux dans notre société et d’ancrer le fait que nos intérêts ne peuvent toujours prévaloir sur les leurs. De plus, chacune de ces réformes rend les produits animaux un peu moins compétitifs par rapport à l’alimentation végétale, diminuant la dépendance du public à l’exploitation animale.
La végéphobie continue de s’atténuer
Pendant ce temps, le débat sur l’acceptabilité de l’exploitation animale continue. La pression sociale à l’encontre des végétarien·ne·s a largement diminué.
Les premiers signes ont été que dès 2020, on parle végétarisme à l’Assemblée nationale. Des associations écologistes comme WWF ou de protection animale type SPA ont aussi enfin osé promouvoir (d’abord timidement) le végétarisme. Alors qu’en 2020 le WWF ne considérait même pas les labels végétariens (dont végétaliens) comme étant des labels responsables, en 2025 il dénonce la pêche et l’élevage comme étant la cause première de la sixième extinction de masse.
Le tabou lié à l’alimentation tombe aussi chez les politiques, qui adoptent enfin un point de vue environnemental cohérent, prenant autant en compte l’impact de l’élevage que celui des transports.
La distanciation sociale par le choix d’une alimentation végétarienne ou végétalienne est d’autant plus réduite que tous les restaurants proposent maintenant de nombreux plats végétaux. Il est en plus devenu rare de ne pas avoir au moins une végétarienne parmi ses proches. L’altruisme envers les animaux est aussi mieux compris et mieux accepté.
Sous la pression des associations animalistes et à longueur d’interventions télévisées, de vidéos YouTube et de tribunes, le concept de spécisme est enfin compris par la majorité de la population aux alentours de 2030. D’ailleurs, les connaissances en éthologie et philosophie se sont aussi largement améliorées, et les arguments comme le « cri de la carotte » ou le « lion qui mange la gazelle » sont devenus des stéréotypes de beaufitude. Les médias grand public traitent avec objectivité la question animale et les phobiques de l’altruisme animaliste tels que Paul Ariès ou Jocelyne Porcher finissent leurs carrières de sophistes loin des caméras.
Les programmes scolaires suivent la tendance, avec l’introduction de l’éthologie au programme de biologie du collège et de l’éthique animale au programme de philosophie du lycée. L’introduction d’un enseignement spécifique de la démarche critique, d’abord en option puis en tant que matière à part entière, porte atteinte sur la durée à la défense des pratiques au nom de la “Nature”, ainsi qu’à l’attachement aux traditions et pratiques majoritaires inquestionnées.
À partir de 2025, l’ascension de l’écologie met fin à l’âge d’or de l’exploitation animale
Mais les plus grandes réformes frappant l’exploitation animale au portefeuille viennent d’abord de l’écologie. Amorcée en 2006, la dénonciation par les instances scientifiques de la pêche et de l’élevage comme les pires fléaux pour le climat et la biodiversité ne fait que s’amplifier. En 2025, les recommandations alimentaires nationales prennent enfin en compte le facteur environnemental. Celles-ci conseillent alors de réduire de moitié la consommation de produits animaux, ainsi que de mieux renseigner le public sur les alimentations végétariennes (dont le végétalisme). Ces recommandations basées sur des résultats de la cohorte NutriNet sont aussi l’occasion de rattraper le retard sur les connaissances nutritionnelles, pourtant bien établies dans d’autres pays. Les recommandations reconnaissent qu’un régime alimentaire végétarien bien mené peut être adapté à tous les âges de la vie, et même améliorer la santé par rapport au régime alimentaire français moyen.
L’année suivante, l’affichage de l’impact carbone sous la forme de logos colorés est rendu obligatoire sur les produits alimentaires. Le gouvernement incite aussi à la réduction de la consommation de produits animaux en établissant des directives nationales pour baisser l’impact écologique de la restauration collective (cantines et administrations). Entre 2025 et 2040, les cantines passent d’une option végétarienne une fois par semaine à une option végétarienne à chaque repas, puis aux menus végétaliens par défaut 3 jours par semaine, avec option carnée sur demande.
Subissant des crises économiques à répétition depuis 2030, le gouvernement décide de réduire drastiquement les subventions pour les exploitations agricoles les plus polluantes d’une part et pour la pêche d’autre part, en raison de ses atteintes à la biodiversité marine (ce qui ne suffira pas à empêcher l’effondrement brutal des populations mondiales de poissons). Une partie des subventions est reportée sur le développement des productions légumières, fruitières et de légumineuses afin de renforcer l’indépendance alimentaire française.
Dans le but de ne pas reporter le problème environnemental à l’étranger, et dans une logique de plus en plus forte de restauration des frontières économiques, des taxes sont appliquées pour tous les produits animaux importés.
La croissance du secteur de l’alimentation végétale
De nombreuses exploitations céréalières et animales dépendant totalement des subventions, le prix des produits animaux et des céréales qui les nourrissent double en l’espace de 10 ans. Le dérèglement climatique rend les rendements de fourrages et de céréales plus incertains et accroît la pression sur les filières, causant la fermeture de nombreuses exploitations. La raréfaction brutale des poissons dans les océans fait exploser les prix et sensibilise à la non-durabilité de cette consommation.
L’alimentation végétale est de plus en plus la norme, et les poissons, viandes, laitages et œufs sont de plus en plus perçus comme des produits accessoires, des produits de luxe. En 2040, le gouvernement applique de surcroît une taxe à 30 % sur le poisson, la viande rouge, les produits laitiers et les produits transformés contenant plus de 10 % de produits animaux issus de ces catégories.
La viande de culture n’est pas concernée par ces mesures environnementales, mais elle ne parvient pas plus à s’imposer que les nombreuses alternatives végétales existant depuis longtemps. Sans être un fiasco total, elle ne représente qu’une petite partie des rayons viande et « mer » dans les supermarchés. Elle est cependant un peu plus répandue en restauration collective et dans les fast-foods, sans pour autant constituer un argument de vente.
Les grandes marques s’adaptent bien, proposant presque toutes des gammes végétales, de viande de culture ou mixtes, à part Charal qui s’enorgueillit d’être « purement carniste ».
Le lait de culture, produit sans recours à l’élevage, devient un produit bon marché. Avec les taxes et sans les subventions, les fromages issus de lait cultivé ou de produits végétaux devient nettement moins cher que le fromage industriel issu des élevages. La plupart des marques les intègrent dans leurs recettes.
L’offre artisanale aussi bien qu’industrielle de fromages non liés à l’élevage rivalise puis dépasse celle des fromages à base de sécrétions mammaires. Danone devient la première grande marque française à faire la transition complète, avec un certain succès grâce à ses gammes végétales « santé et environnement ».
Les trois décennies de recul
En 2038, les crises économiques s’enchainant depuis une dizaine d’années ont renforcé les tensions sociales et entraîné l’accession au pouvoir d’un gouvernement autoritaire promettant de restaurer la grandeur nationale. Ce gouvernement entreprend de grandes mesures interventionnistes afin de lutter contre le changement climatique et le gaspillage de ressources, tout en visant à renforcer l’autonomie économique du pays. La dynamique vers la végétalisation globale de l’alimentation ne s’en retrouve ainsi que renforcée.
En revanche, une recrudescence des actions confrontationnelles a largement inversé la tendance des années précédentes à la normalisation des idées abolitionnistes. Le premier événement ayant stoppé net le mouvement a été une initiative internationale nommée la Nuit des vitrines. Frustrées de la lenteur d’évolution de la société, et encouragées par le début d’acceptation des idées abolitionnistes, les partisanes de l’action directe ont imaginé une grande action collective, profitant de leur grand nombre pour attaquer sur l’ensemble du territoire les lieux symboliques de l’exploitation animale. Le 31 octobre 2041, 7500 vitrines de boucheries sont brisées, des laboratoires sont pillés et les animaux s’y trouvant libérés et des abattoirs sont brûlés.
Sur les réseaux sociaux, un grand nombre d’internautes se félicitent de ces actions n’ayant fait aucune victime. Les journaux tournent en boucle sur ces événements pendant des jours, en concourant au discours le plus alarmiste propre à augmenter l’audience. Bien que la plupart des organisations se désolidarisent à demi-mot de ces actions, les associations animalistes ne tardent pas à en faire les frais. Les locaux des associations et de leurs dirigeants sont tous perquisitionnés. Leurs matériels sont saisis. De nombreuses militantes sont mises en prison dans des attentes de jugement qui mettent des mois à avoir lieu [3]. Dans l’année, des lois scélérates sont instaurées [4], qui rendent passible d’amende tout propos abolitionniste proféré publiquement et de prison les incitations à l’action directe contre les maillons de l’exploitation animale. Dans ces conditions, plus aucun élu ne se risque à soutenir les avancées au nom de l’animalisme. Même les associations demandant de simples améliorations de la condition animale ne sont plus reçues par les politiques, qui craignent pour leur image. Le changement climatique n’autorisant pas à encenser la production de viande de vache, le gouvernement trouve dans le coq français un symbole idéal pour s’opposer à « l’effondrement des valeurs de la France » en lançant un grand programme de soutien à l’élevage aviaire, démultipliant le nombre de victimes de l’exploitation, dans le silence laissé par les lois scélérates.
Dans ce contexte où la parole publique abolitionniste n’est plus possible, la pression sociale rend le plaidoyer de proche en proche très difficile. Le mouvement animaliste s’enferme pendant des années dans une logique de clandestinité. Du début des années 40 et pendant plus de 20 ans, une partie de ses acteurs se réfugie dans les luttes écologistes, qui gagnent du terrain, afin d’augmenter les contraintes sur les élevages et les grands céréaliers qui les fournissent. Une autre partie continue de plaider pour l’animalisme, au sein d’associations ne visant que des améliorations des conditions d’exploitation, mais en se gardant bien d’affirmer publiquement leur abolitionnisme. Enfin, une marge sans cesse renouvelée d’abolitionnistes poursuit une lutte sporadique de sabotages, incendies et autres dégradations, confortant régulièrement la lutte menée par les gouvernements contre le « terrorisme antispéciste ».
Les crises financières, industrielles, technologiques, migratoires, militaires, démocratiques, climatiques et sanitaires (antibiorésistance aidant) s’enchaînent et la culture et l’éducation ne sont plus la priorité. Au cours des trente années qui suivent, le progrès culturel fulgurant précédent, ayant imposé les animaux comme des bénéficiaires valables de l’éthique humaine, protégés par des règles sociales pour leur valeur intrinsèque, est peu à peu perdu. Au contraire, la végéphobie regagne du terrain, d’autant plus que des complotistes accusent des antispécistes d’avoir créé le virus de la grande grippe porcine, s’étant propagée à la population humaine et ayant fait des dizaines de millions de morts dans le monde, dont quelques centaines de milliers de victimes humaines.
S’il reste globalement bien vu d’être végétarien pour sa santé ou l’environnement, de nombreux responsables associatifs ou politiques se sentent obligés d’affirmer qu’ils ne sont pas végétariens pour les animaux et n’ont rien à voir avec les « organisations terroristes ».
En mai 2069, la révolte traverse toutes les couches sociales de la société, contre un pouvoir trop centralisé et trop autoritaire. Le gouvernement est destitué et un collège est désigné pour consulter la population et établir de nouvelles règles de gouvernement.
Années 70 : le renouveau
Les nouvelles élections amènent au pouvoir une génération ayant grandi dans une société où l’exploitation animale n’allait pas de soi et vit dans un monde où ses effets négatifs environnementaux et sanitaires sont clairement reconnus. Si les crises multiples sont toujours là, la société commence à se relever doucement, en particulier grâce à un fort renouveau démocratique et la volonté de restaurer la culture, l’éducation, la solidarité et l’environnement. Dans cette tendance à retrouver les valeurs de la génération précédente, le végétarisme n’est plus moqué, mais reconnu comme un comportement responsable. Seuls quelques journaux réactionnaires font encore l’apologie des traditions culinaires, mais plus aucun ne défend le suprémacisme humain comme l’ont pu faire les intellectuels médiatiques du début du siècle.
Malgré la volonté nationale d’en finir avec le recul de l’éducation et de la culture, la diffusion des idées est de nouveau centralisée dans les mains des médias privés et nationaux. Beaucoup moins de monde a accès à internet qu’au début du siècle. L’animalisme ne peut plus autant compter sur les reportages-chocs pour s’imposer dans la sphère médiatique.
Les plus grands progrès viennent d’un large mouvement culturel promouvant l’empathie et l’altruisme, représenté par de nombreux artistes [5] et intellectuels. Leurs livres, tribunes, vidéos et musiques sont appréciés par toute une nouvelle génération, qui adhère de plus en plus nombreuse à l’idée que la zoophagie est la mère de toutes les violences et devrait faire partie du passé. Les auteures du début du siècle, comme Élise Desaulniers ou Sue Donaldson sont redécouvertes et encensées pour leurs travaux précurseurs.
Des communautés véganes, hébergeant des animaux sortis de la chaîne de l’exploitation, se multiplient dans les campagnes (sans grand impact global). Certains villages tentent même, sans succès, de prohiber la vente et la consommation de produits animaux sur leurs territoires. Les murs, trottoirs et même certains étals de maraîchers et supermarchés affichent des slogans en faveur de l’altruisme envers les animaux. Ce changement profond s’accompagne d’une reconnaissance de la convergence des luttes sociales avec l’animalisme : il est exceptionnel que les personnes engagées dans les luttes féministes, queers ou antiracistes ne soient pas véganes, tant le rejet de l’idéologie carniste y est fort.
L’émergence de la revendication abolitionniste au parlement et la massification du mouvement
En 20 ans, en s’aidant d’une forte diffusion de la culture culinaire végétale ainsi que de la démocratisation des viandes de culture [6], le véganisme passe de 2 % de la population à plus de 7 %. L’abolition de l’exploitation animale est soutenue par plus de 60 % de la population. Des parlementaires s’emparent de cette question, quelle que soit leur tendance partisane.
Dans les années 80, les demandes de référendum sur l’abolition de l’exploitation animale se répètent chaque année, sans jamais parvenir à susciter un vote national, les opposants à l’abolition menant une campagne acharnée pour éviter qu’il puisse être mis à l’ordre du jour.
De nombreuses réformes sont proposées par ailleurs, avec succès. La pêche poissonnière, devenue une pratique économiquement anecdotique depuis la quasi-disparition des populations de poissons marins et l’invasion des méduses, est interdite au nom de son impossibilité à respecter les normes d’abattage les plus basiques. Les élevages de poissons doivent s’adapter à des densités de population maximales divisées par 15.
Pour les animaux terrestres, la fin de l’exploitation intensive et en bâtiment clos est votée en 2079, avec l’interdiction des nouvelles installations à partir de 2081 et un délai de 12 ans pour la mise en application. Les nombreux élus défenseurs de l’élevage avaient initialement demandé 20 ans de délai, mais jugent le compromis acceptable : il a été convenu dans les négociations que les éleveurs qui fermeraient leur exploitation verraient leur salaire maintenu par l’État pendant 10 ans et bénéficieraient d’un programme d’aide à la reconversion.
Ce programme en apparence généreux ne coûte en fait rien à l’État, étant donné qu’il s’accompagne de la fin des subventions qui maintenaient l’activité de ces élevages et des céréaliers qui les fournissaient. Mais même ce délai de 12 ans est jugé bien trop long pour l’opinion publique. Ceci crée une frustration de plus en plus importante face à l’incapacité de l’élevage à se réformer.
Avant même la mise en application de cette loi, le parlement vote l’interdiction de l’enfermement dans des conditions ne respectant pas les besoins basiques des individus. Cette nouvelle réglementation interdit les hardes porcines de plus de 20 individus et les groupes de poules de plus de 30 membres par territoire respectif. Ces règles sont extrêmement difficiles à appliquer pour le secteur de l’élevage déjà en crise depuis des décennies. Ne croyant pas à la mise en application des nouvelles réglementations, tournées en ridicule par les anti-abolitionnistes, les exploitations n’ont pas profité de la période qui leur était donnée pour se mettre en conformité et sont ouvertement hors-la-loi. Cette attitude est instrumentalisée par les animalistes politiques pour montrer que tant que les animaux d’élevage seront considérés comme des propriétés, il sera impossible de les traiter avec respect.
L’abolition
En 2095, les sondages donnent une avance confortable au vote abolitionniste en cas de référendum. Une coalition de circonstance pour ce sujet devenu une préoccupation majeure de la population arrive enfin à imposer un référendum en 2099. Celui-ci prévoit l’arrêt immédiat de la délivrance de permis pour de nouvelles installations, l’interdiction de la reproduction assistée en 2104 et la fermeture définitive des abattoirs 10 ans plus tard. La victoire est écrasante, avec plus de 66 % de votes favorables. Avec une population à plus de 20 % végane, la France devient en 2114 le 12e pays à interdire la pratique de l’exploitation animale sur l’ensemble de son territoire et la vente de ses produits. Elle rejoint ainsi les rangs des pays abolitionnistes, comprenant entre autres la Suisse et les pays scandinaves, où l’abolition est effective depuis plus de 20 ans. Un siècle sera encore nécessaire pour que l’abolition légale de l’exploitation se diffuse dans l’ensemble de la société humaine et mette ainsi fin à ce qui restera le plus grand crime de l’histoire humaine, commis d’abord par nécessité, puis poursuivi pendant plus de 150 ans au nom d’une idéologie suprémaciste.
Notes et références
↑1 | Quelques autres anticipations ont déjà été proposées :
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↑2 | Pour plus de détails sur les conséquences négatives de certaines actions clivantes : Frédéric Mesguich, Où mène la confrontation ?, Les Questions Décomposent, 2018 |
↑3 | Une situation analogue a déjà eu lieu en Autriche en 2008, comme l’a décrite Martin Balluch à sa sortie de prison : « Déclaration de Martin Balluch après sa libération », Cahiers antispécistes n°30-31 – 2008. |
↑4 | Référence aux lois scélérates (page Wikipédia) qui ont stoppé net l’anarchisme à la fin du 19e siècle (suite à l’épisode de la propagande par le fait), interdisant tout type de propagande anarchiste, encourageant la délation et autorisant l’inculpation de tout sympathisant à un groupe délictueux. Des lois visant spécifiquement la communication animaliste ont déjà été mises en place aux Etats-Unis (ag-gag laws) et proposées en France et au Canada en 2019 :
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↑5 | Frédéric Coté-Boudreau a plus longuement abordé le sujet des représentations artistiques dénonçant l’exploitation et promouvant une société végane : « Vers un monde végane (2): représenter les animaux », coteboudreau.com, 2015. |
↑6 | Une viande obtenue sans exploitation animale peut être qualifiée de végane, bien qu’il soit probablement nuisible de la relier à ce terme :
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