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Que faites-vous pour les animaux ?
Je suis un fermier véganique. Qu’est-ce que ça veut dire ? Avec ma femme Mélanie Bernier nous avons créé La Ferme de l’Aube avec une vision : produire des cultures avec des fertilisants provenant uniquement de plantes.
Aujourd’hui plus de 400 variétés de fruits, de légumes, de fleurs, de fines herbes, d’arbustes et d’arbres sont plantés et cultivés. Cette biodiversité fournit un abri et de la nourriture à la faune et aux insectes qui habitent ici, à la lisière d’une forêt de feuillus et de conifères dans la municipalité de Boileau au Québec. Notre ferme est l’exemple vivant que c’est possible. Cultiver pour se nourrir tout en ayant un minimum d’impact sur notre environnement. Planter et cultiver pour que tout le monde puisse en profiter. Créer de la beauté dans un monde qui en a grandement besoin.
En tant que végane, petit agriculteur, chercheur et auteur, je souhaite changer l’état d’esprit de celles et ceux qui travaillent également dans ce secteur. Je viens d’ailleurs de publier un manuel d’agriculture véganique pour transmettre mes connaissances, The Veganic Grower’s Handbook (Lantern, 2023).
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Qu’est-ce qui est le plus difficile dans votre activisme ?
Vivant à la campagne entourée de toutes les beautés qu’offre la nature, je vois chaque jour l’exploitation des animaux de ferme. Les gens de la campagne semblent coincés dans des vies comme il y a deux ou trois générations. Je les vois chasser, piéger, pêcher, élever des animaux de ferme et détruire le milieu naturel par ignorance. Les gens ont peur du changement, ils craignent de quitter leur zone de confort sans se rendre compte que sans le monde vivant notre espèce aussi va disparaître. Frustrant ? Absolument. D’autant plus que nous vivons en 2023 avec toutes ces informations à portée de main. Je garde quand même l’espoir que les gens vont se réveiller et devenir véganes.
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Qu’est-ce qui vous semble compliqué avec l’antispécisme ?
Les humains ont réussi à dominer toutes les autres formes de vie sur la planète. En tant que personne qui, depuis 25 ans, plonge ses mains dans la terre, je sais que sans un sol sain, il n’y a pas de vie. Sans écosystèmes sains, il n’y a pas de vie. Sans animaux sauvages en bonne santé, il n’y a pas de vie. Sans êtres humains en bonne santé, il n’y a pas de vie. Si nous voulons assurer un avenir à nos enfants et petits-enfants une révolution antispéciste mondiale est nécessaire.
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Qu’est-ce qui vous énerve avec l’antispécisme ?
Nous sommes un petit mouvement qui n’en a pas moins beaucoup de leaders et de voix. Mais nous sommes divisés. Nous fonctionnons dans la compétition, dans l’égoïsme. Aussi difficile que soit notre mission, nous devons agir avec compassion. C’est le cœur du message. Si nous mettons de côté nos différences personnelles et collaborons, il y a de l’espoir. Lorsque j’ai commencé mon activisme antispéciste il y a plus de 8 ans, j’étais en colère. En colère contre la façon dont nous traitons le monde et ses habitants. En colère qu’on me mente. Mais transformer cette colère en un message rempli d’amour m’a permis de continuer. Ce n’est pas facile et parfois je tombe, mais je me relève !
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Quelle tactique vous paraît la plus prometteuse ?
Je ne crois pas qu’il existe une tactique individuelle qui fonctionne mieux qu’une autre. Cela dépend du moment et de la région. Ce qui fonctionne à Montréal peut ne pas fonctionner à Mont-Tremblant [une région du Québec]. Ce qui fonctionne à Toronto peut ne pas fonctionner à La Nouvelle-Orléans. Ce qui me semblerait le plus bénéfique, c’est que les antispécistes s’impliquent à tous les niveaux de la société: ouvriers du bâtiment, mécaniciens, éducatrices, philosophes, avocates, politiciens, médecins, artistes et agriculteurs. Lorsqu’un agriculteur montre qu’il existe des alternatives, lorsqu’une politicienne parle de ces idées, lorsqu’un mécanicien partage ses muffins véganes à la pause, cela inspire les gens. Une chose est sûre, nous serons toujours plus forts collectivement qu’individuellement.