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Il faut comprendre la dualité humain-animal à la lumière du concept de race. Voilà tout le projet du black veganism que développe la philosophe américaine Syl Ko.
(Ce texte, extrait d’une correspondance avec la militante allemande Palang, a été publié sur simorg.de et traduit de l’anglais par Martin Gibert.)
Ce n’est pas la colonisation occidentale qui a conduit les êtres humains à user et abuser de la vie non humaine, pas plus qu’elle n’est responsable d’une conception morale particulièrement hiérarchisante de l’être humain. Quiconque affirme le contraire oublie complètement l’histoire de notre espèce et devrait se renseigner sur la question. Allez lire un peu d’Aristote si vous ne me croyez pas – il vivait bien avant que l’Espagne ne décide d’étendre son empire.
Ceci dit, je crois que le problème de l’humanité et celui de l’ab/us des animaux non humains sont néanmoins imputables à la colonisation occidentale. Il ne s’agit pas de dire qu’un évènement postérieur (la colonisation occidentale) a entrainé un évènement antérieur (l’asservissement des animaux non humains). Mon idée, c’est plutôt qu’avec la colonisation, les attitudes et les actions antérieures, quand bien même elles sont restées identiques en surface, se sont transformées en quelque chose de radicalement différent.
La persécution des juifs et des musulmans a commencé bien avant l’arrivée de Christophe Colomb et sa bande dans les Amériques. Il n’empêche que la colonisation a donné naissance à un nouvel ordre épistémologique qui a relégué l’indigène sous l’homme d’Europe occidentale. Or, ce nouvel ordre, dont la fonction principale était de hiérarchiser les degrés d’Humanité, en vint à déterminer, rétrospectivement, ce que signifiait la persécution des juifs et des musulmans. Il a pour ainsi dire redéfini le fait d’être juif ou musulman. Notre façon de comprendre les juifs et les musulmans a été directement façonnée et informée par ce nouveau système de connaissances qui s’élaborait dans le “Nouveau Monde”.
Qui sont les vrais Humains ?
Selon [le sociologue portoricain] Ramon Grosfoguel, la persécution des juifs et des musulmans viendrait d’abord de leur mauvaise pratique de la foi. Ils étaient assassinés, exploités et chassés de leurs foyers vers des pays étrangers s’ils ne se convertissaient pas au christianisme. Mais c’est leur religion qui était taxée d’inférieure.
En revanche, avec Christophe Colomb et les débats sur l’Humanité des peuples indigènes, les désaccords sur la religion n’étaient plus seulement théologiques. Il s’agissait de savoir qui était un être humain à part entière. Bien sûr, les juifs et les musulmans étaient toujours persécutés, mais il s’agissait dorénavant de les persécuter parce qu’ils étaient des sous-humains.

À première vue, rien n’avait changé en termes d’exploitation, d’expulsion et de meurtre pour ces groupes. Mais en réalité, les juifs et les musulmans n’étaient plus simplement des personnes avec de mauvaises pratiques religieuses. Ils n’étaient plus des personnes du tout. Voilà le fondement de leur subordination. Grosfoguel parle d’un effet boomerang. Même si les événements survenus dans le “Nouveau Monde” n’ont pas provoqué leur subordination, ils ont déterminé ce que signifie aujourd’hui d’être juifs ou musulmans. Être juif ou musulman, dans un monde d’après le “Nouveau Monde”, c’est être un tout autre genre d’être.
Les animaux sont racisés
Voilà qui pose le cadre dans lequel je développe ma position, le black veganism* : je soutiens que les animaux non humains sont racisés et que nous devrions comprendre leur subordination comme un phénomène racial. Comme je l’ai dit, je n’ai pas l’ambition de faire l’histoire de l’ab/us des animaux non humains par l’humanité. En cela, l’éthique que je propose se distingue de théories plus connues, ce qui rend ma théorie hétérodoxe et sujette à de mauvaises interprétations. Je ne nie pas l’importance d’examiner l’histoire des humains ab/usant des non-humains. Mais pour théoriser la condition actuelle des animaux et le chemin pour la changer, il faut reconnaitre qu’elle découle d’une logique contemporaine, cette logique du monde moderne qui est une logique de la race. Penser autrement, c’est diluer la condition animale dans les brumes de l’histoire.
La logique du monde moderne émerge avec le débat sur l’humanité des peuples autochtones des Amériques, et elle se concrétise lorsque les esclaves africains entrent en scène. Comme le dit Frantz Fanon, la race a été épidermisée, mais fondamentalement la race est un système établi à l’échelle mondiale qui suit les degrés d’Humanité et se reflète dans nos institutions. C’est une erreur de penser que la race et le racisme ont toujours existé. Certes, les préjugés fondés sur l’identité ont toujours existé. Certes, la discrimination fondée sur la similarité a toujours existé. Mais la race est une idée nouvelle. La race est un système très spécifique qui n’existait pas et ne pouvait pas exister avant qu’un petit groupe de personnes ne déclare qu’il voulait littéralement prendre le contrôle de la planète et l’homogénéiser à son image. C’est la clé. La pensée raciale est la globalisation d’une conception locale du soi car, pour réaliser cet objectif, il faut coloniser le concept même d’être “humain”.
Sylvia Wynter, Frantz Fanon et la disparition des animaux
Que se passe-t-il lorsqu’un petit groupe de personnes se déclarent les vrais humains (les Humains) ? C’est là que le travail de [l’écrivaine et philosophe jamaïcaine] Sylvia Wynter est crucial. Je m’appuie sur son explication pour l’enrichir de considérations sur l’animal [1]. Il faut pouvoir se mesurer à des groupes similaires incarnant ce que c’est que de ne pas être Humain, sans quoi la bannière de la “vraie humanité” représente une doctrine vide. Mais échouer à être Humain, ce n’est pas être un animal non humain. Pourquoi? D’une part, parce que les non-humains, puisqu’ils ne sont pas au départ des humains, ne peuvent pas incarner l’échec du devenir humain. Ils ne peuvent donc jamais constituer une véritable altérité. Ils ne peuvent pas servir à gonfler le statut de l’Humain. Les non-humains ne peuvent être, tout au plus, que des ersatz des Autres [2].
D’autre part, et c’est encore plus important, les animaux non humains ne peuvent pas expérimenter subjectivement un quelconque manque d’humanité. Ils sont à la fois épistémiquement résistants et épistémiquement fermés à nous, de sorte que nous ne pouvons pas contrôler leurs perspectives subjectives pour les programmer afin qu’ils souffrent de se sentir moins qu’humain. Si Sylvia Wynter s’intéresse à cet aspect du travail de Frantz Fanon, à savoir l’expérience subjective d’être noir ou d’être une personne colonisée, c’est précisément parce que des traits “autophobes” comme la haine de soi ou le racisme internalisé sont essentiels pour maintenir cette invention qu’est l’Humain. L’Humain parasite non seulement la catégorie de l’anti-Humain, mais surtout l’infériorité ressentie par les membres de cette catégorie [3].
D’où vient l’incapacité de parvenir à l’Humanité? D’un manque de ce que les vrais humains (les Humains) possèdent. C’est ce second point qui distingue le black veganism des positions habituelles. Je pense que la division binaire humain-animal ne fait pas référence aux êtres humains et aux animaux non humains au sens littéral. Elle ne se réfère pas à des classes biologiques qui représenteraient l’ensemble des humains, et son corollaire, l’ensemble des animaux non humains. En fait, l’Humain et l’Animal sont des catégories sociales : elles représentent ce que c’est que d’être un “véritable” humain et ce que c’est que d’être le contraire. Or le contraire d’un véritable humain (Humain), ce n’est pas un animal non humain mais d’autres êtres humains, des anti-Humains [4]. Ainsi, l’Animal et l’anti-Humain doivent être compris comme des figures identiques, ce qui nous conduit à cet étonnant paradoxe: les animaux non humains sont tellement invisibles qu’ils ne constituent même pas la base sur laquelle nous assoyons la catégorie générale de l’Animal. La catégorie Animale fait disparaitre les animaux.
La limite inférieure de l’Humanité
Beaucoup de personnes trouvent ma position dérangeante. Elles croient :
- que j’essaie d’éliminer du tableau les animaux en théorisant une dualité interne aux êtres humains.
- que peu importe à qui Humain et Animal se réfèrent dans cette dualité, puisque Humain est la catégorie supérieure et Animal la catégorie inférieure, ce qui correspond à la tradition humaine du spécisme.
- que cette interprétation raciale de la dualité humain-animal ne semble pas s’appliquer aux animaux. Or, une théorie qui se prétend un type de véganisme ne devrait-elle pas être à leur propos ?
Toutes ces objections sont raisonnables et elles méritent d’être examinées. Mais je ne vais pas le faire dans cet ordre.
Tout d’abord, il faut voir que cette lecture raciale de la dualité humain-animal (ou Humain-Animal, c’est-à-dire anti-Humain) s’applique directement aux animaux non humains. Il est important d’inscrire leur lutte dans le cadre du projet général de fabrique de l’Humain, afin de savoir qui ils sont, et quelle est leur condition après le “Nouveau Monde”. Comme certain.es l’ont remarqué à juste titre (voir l’objection n° 2 ci-dessus), historiquement, les figures de l’humain et de l’animal ont été non seulement construites comme différentes mais aussi comme opposées. Une logique qui reconfigure ce qu’est l’humain (devenu l’Humain) devrait également reconfigurer ce qu’est l’animal (devenu l’Animal ou l’anti-Humain).
Il est impossible d’établir la multitude d’univers sociaux qui existaient avant l’arrivée de Christophe Colomb dans les Amériques et qui, chacun à leurs façons, faisaient des animaux non humains – ou du moins de certains d’entre eux – des victimes. Nous ne comprendrons sans doute jamais vraiment ces univers puisque nous n’avons pas d’accès intimes à leurs langues, à leurs modes de connaissance, à leurs systèmes de croyances, à leurs cosmologies, etc. Nous ne pouvons dès lors pas connaître les rituels impliquant des animaux et d’autres humains. Pourtant, on peut dire sans risque de se tromper qu’au moins Colomb et ses acolytes venaient d’un monde social dans lequel les animaux non humains étaient considérés comme moralement inférieurs puisqu’ils étaient dépourvus d’âme. En fait, leur conclusion quant à la ressemblance des Autochtones avec les animaux découlait de la prémisse que les animaux n’ont pas d’âme et, par conséquent, ne peuvent pratiquer la religion.
Sans doute, la division biologique entre les êtres humains et les autres animaux est-elle depuis longtemps conçue en termes moraux, et pas seulement en Europe occidentale. Certain.es auteur.es vont même jusqu’à dire que la vie morale provient de ce détachement d’avec les autres animaux pour cultiver une vie spécifiquement humaine. Douglas Maclean, mon directeur de thèse, explique bien ça dans son article « Is “Being Human” a Moral Concept ? » – même si on peut aussi penser que humain et animal sont, en tant que tels, des concepts moraux, comme le suggèrent les philosophes Cora Diamond, et plus récemment Alice Crary dans son merveilleux livre Inside Ethics [5]. Comme je l’ai déjà dit, je n’essaie pas de nier la réalité : les animaux non humains ont bien été opprimés tout au long de l’histoire de notre espèce.
Ce qui allait devenir le noyau de la pensée raciale, la dualité Humain-Animal (ou anti-Humain), prend donc certainement ses racines dans cette séparation biologique d’avec tous les autres animaux, une séparation que la plupart des systèmes de pensée ont interprétée en termes moraux. Les gens ont raison de le souligner. Mais le black veganism nous dit que ce n’est qu’une partie de l’histoire. Je soutiens qu’une boucle de rétroaction a conduit la dualité Humain-Animal à amplifier les prémisses mêmes qui l’ont amenée à l’existence.
En d’autres termes, nous percevons certains individus – beaucoup dans notre espèce et tous les membres des autres espèces – à travers le concept d’Animal. Les animaux non humains ne sont plus des êtres soumis parce qu’ils sont dépourvus d’âme. Quand bien même rien ne transparaît en surface, c’est d’une autre sorte d’êtres qu’il s’agit désormais, et des êtres soumis de manières différentes.
Nous atteignons ici les limites de l’explication. Car comment décrire le contenu d’un concept ? C’est le même genre de mur que l’on frappe lorsqu’on essaie de décrire des concepts moralement chargés, comme “mère” ou “animal domestique”. Je pense que c’est possible, mais je ne m’attèlerai pas à cette tâche.
Je dirai plutôt ceci : l’absence des animaux non humains dans notre imagination sociale et morale fait beaucoup plus de sens pour moi quand j’y pense sous le prisme du black veganism. Le black veganism présente la dualité comme un principe qui concerne vraiment l’être humain et a deux pôles : d’une part l’être humain (articulé autour de sa manifestation idéale, l’Humain) dans toute sa présence, et d’autre part la désintégration et donc l’absence de l’être humain, l’être littéralement anti-Humain (articulé autour de l’Animal).
Ainsi, l’espace de l’anti-Humain est l’espace où la moralité perd sa structure et son sens car rien ne s’y accroche. C’est comme ça : il vous faut des humains qui ne soient pas des Humains pour que ces concepts acquièrent la valeur morale qu’ils ont aujourd’hui. Nous concevons les animaux non humains à travers ce paradoxe – la structure même de leur être est configurée par l’anti-Humanité. Mais si vous pensez à ce qui se passe vraiment, c’est assez terrible. Ce que montre le black veganism, c’est que la situation des animaux non humains est pire qu’on pouvait le penser – du moins sur le plan conceptuel. Nous ne partons pas du principe que les animaux non humains sont moralement négligeables. Nous les faisons disparaître à l’instant même où nous les concevons comme des animaux.
Avant, du moins dans le monde qui a engendré notre monde actuel, dans le monde de Christophe Colomb, les animaux non humains étaient des êtres dépourvus d’âmes (ou s’ils en avaient, elles étaient “inférieures”, non rationnelles). Mais l’émergence de l’Humain a transformé les animaux dépourvus d’âme en êtres qui ne sont plus, pour l’essentiel, qu’un ersatz d’Humain [6]. Quand on y pense, le geste est monumental [7]. Les animaux non humains ont été catapultés sur une scène où s’affrontaient des thèses sur la nature de l’humanité [8]. Ainsi, les animaux non humains ont été “humanisés”. Avant ça, ils étaient inférieurs mais aussi très différents. Ils sont désormais une limite dans l’échelle de l’humanité. Maintenant, ils jouent dans notre cour. La boucle de rétroaction a pris la fracture biologique entre les êtres humains et les animaux conçue en termes moraux et l’a passée au crible de la dualité Humain-Animal qu’elle a contribué à créer dans le “Nouveau Monde”. Elle a alors renforcé l’inacceptable : l’infériorité et l’invisibilité des animaux non humains. Mais elle l’a fait avec des termes nouveaux – et plus tragiques.
La pensée raciale dans notre assiette
Bref, pour répondre aux objections 1 et 3, non, je n’essaie pas d’exclure les animaux non humains du tableau. Au contraire. Raisons très pratiques et contextuelles mises à part, nous ne pouvons pas parler des animaux si nous ne parlons pas aussi de race. Et nous ne pouvons pas parler de race si nous ne parlons pas des animaux. Je ne pense pas que l’antiracisme soit efficace si nous laissons de côté des milliards d’individus que nous percevons à travers la pensée raciale. Le faire, c’est rater une grosse partie de ce que signifie la race. On n’analyse pas complètement la race tant qu’on n’a pas compris que le noir, l’anti-Humain, est le modèle à partir duquel nous pensons la conception moderne de l’animal. Si nous voulons nous attaquer au racisme et nous débarrasser de la pensée raciale, ce qui implique de renverser notre monde social, nous devons examiner tous les domaines dans lesquels la pensée raciale fonctionne. Et l’un d’eux se trouve tout juste devant nous, dans notre assiette.
Cela montre aussi que le mécanisme qui permet à notre société de ne pas être perturbée par la torture et le meurtre généralisés des animaux non humains, habituellement pour de la nourriture, est celui-là même qui nous fait hausser les épaules devant l’agression persistante contre la Vie et les vies noires et basanées. Les gens ne réalisent pas que leur refus de se remettre en question au sujet des animaux non humains est une marque du trou gigantesque que la pensée raciale creuse dans notre âme. Nous savons bien que des animaux sont maltraités. Le problème n’est pas là. Le problème, c’est qu’ils tombent si bien dans ce trou que personne ne ressent leur douleur. Nous ne sommes littéralement pas touché.es.
Le véganisme ne devrait pas seulement s’intéresser aux animaux non humains au sens propre, mais aussi et surtout au discours sur l’animalité : c’est lui qui est responsable de toutes ces idées sur les animaux. Depuis le XVIe siècle, le discours sur l’animalité, ou plutôt sur l’Animalité, s’est construit de manière analogue au discours sur l’Humanité, c’est-à-dire à partir de l’homme blanc occidental appréhendé comme la manifestation idéale de l’être humain. Que des piles de livres sur l’animal aient négligé ce fait évident montre bien comment la plupart des gens ignorent encore les confins de la race.
Ce texte, traduit de l’anglais avec l’accord de l’autrice par Martin Gibert, est extrait d’une correspondance avec la militante allemande Palang publiée sur simorg.de.
* Note du traducteur : j’ai choisi de garder l’anglais pour distinguer le black veganism comme théorie éthico-politique du « véganisme noir » qui représente le fait social que des personnes noires militent pour le véganisme. Il est évidemment possible d’adhérer aux thèses du black veganism sans être noir.e ou végane.
Notes et références
↑1 | Voir l’article de Wynter « Towards the Sociogenic Principle : Fanon, The Puzzle of Conscious Experience, of “Identity” and What it’s Like to be “Black” » pour sa discussion sur les autres humains. C’est le meilleur article que j’ai lu ces dix dernières années. C’est idéal pour découvrir Sylvia Wynter : elle y explique pourquoi Frantz Fanon est si important et comment son obsession pour Fanon et le problème difficile de la conscience sont au cœur de sa pensée. |
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↑2 | Parfois les personnes de couleur plaisantent en disant que les animaux non humains seront reconnus moralement avant eux. Je ne pense pas que ce soit exact, mais d’un point de vue théorique, il est vrai que l’Humain n’a pas besoin des animaux non humains pour constituer son Autre – il pourrait juste le faire avec d’autres êtres humains. |
↑3 | J’emprunte l’expression « anti-Humain » à l’afro-pessimisme sans nécessairement me revendiquer de cette tradition. |
↑4 | Pour une perspective différente, voir Claire Jean Kim, qui soutient que nous devrions considérer l’Humain, l’Animal et le Noir comme une triade plutôt que comme une dualité. Je ne suis pas d’accord parce que je pense que c’est forcer l’approche qui insiste sur la longue tradition d’utilisation des animaux avec l’approche actuelle du monde moderne, et donc négliger la redondance de l’Animal et du Noir. Ceci étant dit, notre travail s’inscrit dans le même esprit. Voir son article « Murder and Mattering in Harambe’s House » dans Politics and Animals, Vol 3 (2017). |
↑5 | Pour l’article de Maclean’s, voir Philosophy and Public Policy Quarterly 30 (3/4):16-20 (2010) ; pour Diamond, voir « Eating Meat and Eating People », Philosophy, Vol. 53, No. 206 (oct. 1978), pp. 465-479 ; pour Crary, voir Inside Ethics, Harvard University Press (2016). |
↑6 | À ne pas confondre avec le changement qui a affecté tous les animaux non humains lorsqu’on a attribué un rôle particulier au singe. À l’époque médiévale, les singes en sont venus à représenter l’image de l’humain dégénéré, une dégénérescence due au péché et qu’il faut punir (voir le célèbre De Mundi Universitate de l’écrivain du XIIe siècle Bernardus Silvestris). Le singe jouait déjà le rôle qu’il allait jouer plus tard dans l’imaginaire social post-Darwin avec le vocabulaire des sciences naturelles plutôt que de la théologie. Sylvia Wynter discute de l’iconographie de l’être humain-singe dégénéré dans « Unsettling the Coloniality of Being/ Power/ Truth/ Freedom : Towards the Human, After Man, It’s Overrepresenation- An Argument » CR : The New Centennial Review, Volume 3, Number 3, automne 2003, pp. 257-337. Le rôle du singe est un exemple très précoce de l’humanisation d’un animal non humain particulier. Notez que je m’intéresse surtout à l’humanisation des animaux non humains au niveau du concept même d’Animal. |
↑7 | Comme le note Mark S. Roberts, « l’animal est placé carrément à l’intérieur de l’humain ». Voyez son The Mark of the Beas: Animality and Human Oppression (New Directions in the Human-Animal Bond), Purdue University Press (2008) : 20. |
↑8 | La théorie de l’évolution était nécessaire pour ce changement taxonomique majeur. Et même si cette théorie ne fut pas responsable du changement, la dynamique sociale fit qu’une fois que Darwin eut donné des preuves convaincantes de l’effondrement de la distinction entre humain et animal, les animaux purent jouer un rôle de contrepoint pour les humains. |